Focus – Pourquoi on a besoin de fanfictions
C’est en discutant avec mon amie Élodie que je me faisais cette réflexion : les fanfictions, c’est sous-côté, c’est méprisé, et pourtant… Pourtant, c’est quelque chose que beaucoup d’entre nous ont croisé sur leur route, que ce soit en tant que lecteurice ou auteurice. Voilà ma réflexion sur ce sujet en quelques points.
Le premier point, c’est qu’en fanfiction, on va rechercher les univers que l’on connaît, que l’on aime et avec lesquels on est à l’aise. C’est donc des choses qui nous sont familières, que ce soit les univers ou les personnages. Les fanfictions font partie intégrante d’un univers et nous font vibrer ! Et on sait tous que les choses familières, ça rassure, on se sent en sécurité. On sait où on va. Et ça, mine de rien, c’est satisfaisant. En lecture, ça nous permet de savoir ce qu’on attend, encore plus lorsqu’on cherche des tags bien précis (fluff, harry potter/draco malefoy et autres trucs que vous voulez, y’a de tout !) et de passer un bon moment. En écriture, mine de rien, ça permet de faire ses premières armes sans construire un univers de A à Z : on l’emprunte. Très pratique, car on s’appuie sur une œuvre de base, des intrigues et des événements qui ont déjà été posées et qui sont déjà connues du lectorat. Et c’est avec le plaisir de se replonger dans cet univers qu’on peut trouver la motivation d’écrire ou de lire des textes longs.
Le second point, c’est que les fanfictions permettent d’aller plus loin. On peut se permettre de rajouter des éléments dans les blancs qu’a laissé l’auteurice. On peut rectifier des petites choses, voire même en changer : vous voulez protester contre la transphobie de Rowling ? Intégrez des personnages trans à votre histoire ! Vous voulez développer le monde magique d’Harry Potter mais en France ? Pas de souci ! Ces univers sont tellement connus qu’on peut se les approprier et les moduler au gré de nos envies, développer ce qu’on veut tout en partant d’une base. Les fanfictions permettent aux fans de s’approprier certains point, de développer des intrigues à partir d’un détail qui n’a pas été approfondi par l’auteur, de réinterpréter à sa manière, de produire une suite possible avec une nouvelle génération, ou carrément de réinventer une histoire avec ses propres personnages, dans des endroits inexplorés par l’auteurice de l’œuvre originale. Et pourquoi pas croiser plusieurs œuvres ? La liberté est énorme en fanfiction.
Le troisième point est essentiel et se vérifie avec les grosses communautés : on peut se réunir autour de fanfics. Ça permet de continuer la magie de l’univers qui nous plaît, et que bien souvent, on n’a pas envie de laisser partir. De trouver des auteurices préféré.e.s, de les suivre, de les encourager, de partager ça avec d’autres lecteurices… Super important, parce que souvent, les fanfictions sont les premières armes des écrivains : trouver un lectorat bienveillant qui ne va pas les corriger à la moindre faute de grammaire peut les motiver à poursuivre l’écriture. D’ailleurs, essentiels : bien souvent sur les sites, ont peut déposer un commentaire sur les textes, et les auteurices nous répondent ! Le contact entre auteurice et lecteurices est direct. Comme c’est un loisir qu’on a du mal à avouer à nos proches pour beaucoup de raison, en parler avec des personnes sur internet qui comprennent notre flamme et qui ont la même, ça permet de créer du lien qu’on ne trouve pas ailleurs. C’est un partage, et totalement gratuit parce qu’on ne peut pas se faire d’argent : un produit dérivé inédit, en quelques sortes ! C’est un échange. Et c’est ça qui est vraiment super. Ce sont aussi des tonnes et des tonnes d’histoires gratuites, à portée de main : quelques manipulations de smartphone et hop, on peut d’immerger dans notre univers doudou. C’est assez important de relever ce caractère simple et gratuit, parce qu’on sait que nous ne sommes pas tous égaux face à la culture, et que nous n’avons pas tous les moyens de dépenser notre paie dans une librairie. Qui plus est, il n’est pas rare d’avoir déjà fait des rencontres IRL entre personnes qui écrivent des fanfictions : personnellement j’ai encore des connaissances, dont une précieuse amie qui écrit “officiellement” pour une maison d’édition, et que j’ai d’abord rencontrées grâce à la fanfiction.
Le quatrième point, c’est l’hétérogénéité des fanfictions. Les personnes qui en écrivent viennent d’horizons différents, sont d’âges différents, et vont donc produire des textes différents. Et comme on peut faire littéralement ce qu’on veut et qu’on se censure très peu, le volume de choses complètement excentrique s’accroît. Quand j’étais encore active dans un fandom, j’étais sur un site où la partie fanfictions attiraient beaucoup de nouveaux membres et quelques noms étaient célèbres : on savait qu’avec untelle, on allait pleurer, avec untelle, on allait avoir du fluff, avec une autre, c’était du smut, une autre était spécialisée dans tel ship… Je parle au féminin, car les études montrent que c’est principalement des femmes qui en écrivent (source). Tout un lexique est développé autour des fanfictions, souvent hérité de l’anglais ou du japonais, des communautés plus actives que la communauté francophone. Qui plus est, les formes peuvent-être extrêmement différentes : du drabble (limite de 100 ou 200 mots) aux romans fleuves de plus d’une centaine de chapitres, publiés en plusieurs tomes… En fonction du temps et de l’implication que vous voulez mettre dans une histoire, vous pouvez choisir ce qui vous intéresse. En décryptant les tags, en tant que lecteur, on peut cerner les histoires et leur contenu pour les trier et trouver ce qu’on veut. Vraiment. Il y aura certainement quelqu’un qui aura écrit ce truc hyper pointu que vous cherchez. Et s’il n’y a personne, qui vous empêche de le faire, vous ?